Il n’en reste qu’un dans la capitale.
Le seul et unique producteur du véritable jambon de Paris à l’ancienne se cache dans un renfoncement de la rue de Charonne. A l’intérieur du petit atelier, charcutiers et désosseurs répètent les mêmes mouvements avec minutie. Ils sont bien rodés et n’ont pas de temps à perdre : chaque jambon est travaillé à la main, pièce par pièce. Une technique de fabrication et une recette mises au point par l’ancien propriétaire, descendant d’une longue lignée de charcutiers.
Mais ce savoir-faire est resté méconnu pendant des années. Ce sont les actuels gérants de la société, Yves et Véronique Le Guel, qui ont su le mettre en valeur. Anciens chimistes, ils décident de se tourner vers l’alimentation. Mais pas n’importe laquelle. À la recherche d’une fabrication de qualité, le couple tombe sur la charcuterie un peu par hasard. En 2005, ils ont un coup de coeur pour le jambon de Paris, un produit qu’ils jugent « noble ». Sans hésiter, ils rachètent Doumbéa-Sojadam. Un drôle de nom qui mêle l’histoire des deux patrons : Sojadam, nom d’origine de l’entreprise, et Doumbéa, nom du village où réside le beau-frère d’Yves Le Guel.
La production artisanale nous tentait bien. Depuis, on est à fond dedans ! Au début c’était difficile, il fallait tout apprendre sur le jambon.
Le défi est relevé avec succès. Rapidement, Véronique et Yves développent l’entreprise. Ils créent une véritable marque autour du produit phare, le « Prince de Paris », marqué du sceau de la Tour Eiffel.
Parallèlement, de nouvelles pièces voient le jour, telles que les rillons ou encore le jambon fumée. Les clients, eux, passent commande depuis l’Allemagne, la Chine, la Russie et même la Thaïlande. En tout, Doumbéa-Sojadam compte environ 200 clients : principalement des boucheries mais aussi quelques restaurateurs gastronomiques, comme Yannick Alléno et Cyril Lignac. Mais le couple assure ne pas courir après la quantité.
Ce n’est pas la peine de s’éparpiller. Il faut rester dans ce que l’on sait faire, en travaillant avec une clientèle exigeante.
Savoir-faire et traçabilité sont leurs maîtres-mots.
Nous avons essayé de faire du bio mais il n’y a aucune différence gustative. Ce qui compte, ce sont les matières premières.
C’est pourquoi Yves et Véronique les sélectionnent avec soin : ils ne jurent que par deux ou trois fournisseurs, dont le marché de Rungis. Ils sont aussi livrés par l’abattoir de Dreux, avec un cahier des charges précis. Parmi les critères essentiels, il faut que la viande soit née, élevée et abattue en France.
On croit en la rigueur française.Nous avons tenté une fois de travailler avec un fournisseur hollandais mais la qualité de la viande n’avait rien à voir, se souvient Yves.
Le jambon de Doumbéa-Sojadam est certifié Saveurs Paris Île-de-France par le Cervia. Le reste ne les intéresse pas. Le couple n’a jamais participé à un concours. Leur obsession, prouver aux clients qu’ils font de la qualité. C’est là que le savoir-faire artisanal entre en jeu.
Leur technique peut prendre plusieurs jours. Certaines étapes n’étaient pas en cours de réalisation au moment de la visite.
Une méthode spécifique à la maison, appliquée au « Prince de Paris ». La saumure (solution aqueuse constituée de sel de Guérande et d’épices spéciales) est injectée manuellement dans le réseau veineux, à l’aide d’une piqueuse. Il obtient alors un jambon à la chair moelleuse et savoureuse.
Contrairement aux productions industrielles, Doumbéa-Sojadam laisse le jus ressortir du jambon pendant la cuisson, formant une gelée.
Conserver un système artisanal tout en se développant à l’international, voilà le nouveau défi du couple Le Guel… aidé, à partir de septembre prochain, de leur fils.
Note : Les produits Doumbéa-Sojadam sont à retrouver chez de nombreux artisans recensés par le Guide du goût.
Anissa HAMMADI
Le Prince de Paris
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